top of page

POST

Créativité, sérénité, bien-être... Dirigeants, valorisez la méditation en entreprise


Publié le 25-07-2015 à 09h29 - Modifié à 13h10

1 réaction | 6227 lu

Temps de lecture : 4 minutes

Par Sébastien Henry Accompagnement de dirigeants

LE PLUS. Faire de la méditation n'a pas forcément un sens religieux et n'est pas non plus qu'une pratique de hippies. La preuve avec la méditation de pleine conscience, qui consiste à se focaliser sur le moment présent et sur les sensations ressenties. Les entreprises gagneraient-elles à initier leurs employés à de telles pratiques ? Réponse de notre contributeur.

Édité par Déborah Zago Auteur parrainé par un visiteur

PARTAGER

RÉAGIR

Image d'illustration d'une jeune femme en pleine méditation. (Nickolai Kashirin/Flickr)

Les signes se multiplient que la pratique de la méditation de pleine conscience – une forme entièrement laïque d’entraînement de l’esprit à placer l’attention dans le moment présent, délibérément et sans jugement, aussi appelée mindfulness – intéresse de plus en plus les entreprises.

S’agit-il d’une simple mode qui risque de tourner à la récupération par des entreprises restant avant tout centrées sur la recherche de la rentabilité maximale, ou d’une inspiration profonde à même de redonner du souffle et du sens au monde des affaires qui en a tant besoin ?

Cette question ne peut être tranchée de façon définitive et générale mais suppose plutôt de se pencher sur les expériences concrètes qui ont déjà été menées ou sont encore en cours. J’ai la chance d’être aux premières loges de ce mouvement, accompagnant moi-même plusieurs entreprises, tout en essayant de garder un regard critique sur les actions en cours.

Les entreprises s'engagent dans des programmes d'initiation

Précisons d’abord ce qui est en train de se produire en ce moment dans un certain nombre d’entreprises pionnières.

Des dirigeants (souvent DRH ou DG), organisent des programmes d’initiation à la mindfulness au sein de leur entreprise, toujours sur un mode laïque et en respectant le principe du volontariat (personne n’est forcé d’y participer).

Il le font soit en raison de leur propre expérience de la mindfulness, soit parce qu’ils ont senti qu’il s’agissait d’un thème qui allait devenir important. Dans la plupart des cas, il s’agit encore de sessions très courtes et sans suivi particulier.

Mais il devient de plus en plus fréquent que des entreprises s’engagent sur un programme d’ampleur sur plusieurs mois, suivant ainsi les conclusions de nombreux travaux scientifiques au sujet de la mindfulness indiquant que des effets significatifs ne peuvent être attendus que sur un période suffisamment longue.

Une réponse à un besoin profond

Quelle est l’intention de ces entreprises ? Pour certaines, l’objectif est avant tout de contenir le stress constaté chez leurs collaborateurs dans des limites qui ne créent pas de dégâts majeurs (prévention des risques dits “psycho-sociaux”).

Mais je constate que la plupart des dirigeants que je rencontre voient plus loin : ils devinent que la pratique de la mindfulness pourrait bien être une réponse profonde à un besoin profond.

Au sein des entreprises que j’accompagne, par exemple, la mindfulness est un sujet pris très au sérieux, proposé aux collaborateurs dans un souci de les aider à veiller à leur bien-être et celui de leurs collègues. Dans tous les cas, la problématique de la performance est présente, mais elle est approchée comme une résultante d’un bien-être renforcé.

Pas d'objectif à atteindre

Tout d’abord, selon le point de vue de nombreux représentants du monde de la sagesse, toute utilisation de la pratique méditative au service d’une fin particulière est abusive. Il ne doit n’y avoir rien à réussir, ni rien à atteindre, et la pratique méditative doit rester “inutile” comme le dit avec force le philosophe Fabrice Midal [1].

C’est un point de vue à mon avis essentiel. En même temps, il faut, je crois, tenir l’idéal de préserver cette authenticité de la pratique tout en intervenant dans un milieu comme l’entreprise où toute action est mesurée à l’aune des résultats qu’elle permet d’atteindre.

C’est évidemment difficile, mais les dirigeants les plus éclairés comprennent très bien ce point : contrairement à ce que l’on pourrait penser, il ne visent pas des résultats immédiats et tous mesurables, même s’ils sont souvent convaincus que cette pratique favorisera l’harmonie collective, le bien-être des collaborateurs, leur créativité, et finalement la performance collective.

La méditation ne règle pas tout

Le risque de récupération existe certainement, comme j’ai pu d’ailleurs moi-même l’observer dans certaines entreprises où la mindfulness est appréhendée comme un simple instrument pour prévenir les burnouts sans qu’aucune des racines du problème ne puisse être abordée.

Mais il y a, à mon avis, un risque bien plus sérieux à prendre en compte : ne pas aller assez loin pour partager cette pratique plus largement dans le monde des affaires, afin de répondre à un besoin profond de sens et de sérénité.

Reste la critique fondamentale que la mindfulness serait un nouvel “opium du peuple” des entreprises, à même de réduire le mal-être ambiant, mais incapable de transformer en profondeur les pratiques d’un monde des affaires qui, tout en créant des emplois nécessaires, contribue à détruire la planète à grande échelle et tolère des inégalités de revenus choquantes.

Des résultats convaincants

Les rencontres que j’ai organisées pour mon dernier livre ("Ces décideurs qui méditent et s’engagent") avec 60 décideurs dans 10 villes dans le monde, qui ont une pratique régulière de la méditation, ont été pour moi source d’un grand espoir.

J’ai eu la confirmation in vivo que, chez les décideurs qui ont une pratique régulière, émerge avec le temps une volonté forte de repenser les pratiques de management et même les produits et services vers davantage de justesse et de contribution positive à la société, face aux enjeux environnementaux et sociaux. Leur regard sur leur action et le rôle qu’ils entendent jouer se transforme peu à peu.

Ce sont avant tout ces rencontres qui m’ont convaincu que le risque principal à l’heure actuelle est de ne pas aller assez loin ni assez vite vers un changement de conscience profond dans le monde des affaires. Le monde a besoin de façon urgente de décideurs qui méditent et s’engagent !

[1] Entretien dans la Tribune, 23 mars 2015.


bottom of page